Psyché de Thomas
LES PREMIÈRES REPRÉSENTATIONS
Opéra-comique : Reprise de Psyché, paroles de M. Jules Barbier et Michel Carre, musique de M. Ambroise Thomas.
On aurait fort à faire à compter tout ce que la fable exquise de Psyché a inspiré de poëmes, de tableaux, de tragédies et de tragi-comédies. M. de Laprade a composé sous ce titre un fort beau poème après la Fontaine, et M. Ambroise Thomas y a trouvé le sujet d’un opéra après Lulli, comme M. Jules Barbier et feu Michel Carré y ont rencontré un livret après Molière et Pierre Corneille.
C’est en janvier 1857, — il y a vingt et un an passés, — que fut représentée la Psyché de M. Ambroise Thomas. C’était alors un opéra-comique en trois actes, avec dialogue ; c’est aujourd’hui un opéra en quatre actes, allégé du dialogue et augmenté de récitatifs.
Psyché n’avait obtenu, en 1857, qu’un succès très-modéré. Les délicats avaient seuls compris la grâce de ce symbole mis en musique. On avait loué l’ouverture, l’invocation à Vénus, — moins populaire que celle de la Belle-Hélène — la romance de Psyché, le chœur de jeunes filles du second acte :
Quoi ! c’est Éros lui-même
Qui soupire d’amour ?
Et l’air de Psyché : Non, ce n’est pas Éros, et l’imprécation de l’amour « amoureux ». Mais le succès de Psyché avait été plein d’une haute estime. M. Ambroise Thomas devait tôt ou tard, — et avec raison, — en appeler de ce jugement. La cour d’appel du public c’est le public Aujourd’hui juge Hier, et Demain jugera Aujourd’hui.
La représentation nouvelle a été fort brillante. M. Carvalho a monté avec un grand luxe de décors et de costumes l’œuvre remarquable de M. Ambroise Thomas. Dire qu’on ne pourrait reprocher à la partition de Psyché un peu de monotonie ne serait pas exact. Cela est exécuté dans le genre sévère de certaines fresques et dans des teintes un peu grises ; mais, çà et là, éclatent des morceaux de choix, où apparaissent des notes exquises. Le chœur des nymphes, au second acte, est par exemple le plus joli des madrigaux mythologiques.
Mlle Heilbronn a admirablement chanté Psyché. Mme Engally a la plus belle voix du monde. Elle chante à merveille. Il lui reste à apprendre à marcher. Mmes Irma Marié et Donadio Fodor jouent les sœurs de cette Cendrillon païenne. On a beaucoup applaudi M. Morlet dans Mercure. Ce jeune artiste, excellent comédien, est le Coquelin de l’Opéra-Comique. La mythologie de M. Ambroise Thomas n’a rien à voir avec celle d’Offenbach. Elle en diffère comme l’opéra diffère de l’opérette. Mais, même à l’Opéra-Comique, on ne peut pas toujours rire.
Jules Claretie.
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Psyché
Ambroise THOMAS
/Jules BARBIER Michel CARRÉ
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publication date : 15/09/23