Médée

Lors de sa création au Théâtre Feydeau, le 13 mars 1797, cet opéra en trois actes ne remporta qu’un succès d’estime. À l’issue d’une vingtaine de représentations, il disparut des scènes parisiennes jusqu’en… 1962. Il reçut meilleur accueil en terres germaniques, donné dès 1800 à Berlin, deux ans plus tard à Vienne, repris dans divers villes durant tout le XIX^e siècle (Brahms le considérait comme le « sommet de la musique dramatique »). C’est pour la production de Francfort de 1855 que Franz Lachner composa des récitatifs en remplacement des dialogues parlés (en alexandrins) de l’œuvre originale. En 1909, la création italienne à La Scala de Milan donna lieu à une version en italien (avec traduction des récitatifs de Lachner) communément utilisée par la suite, même si la mouture de 1797 regagne peu à peu du terrain depuis la fin du XX^e siècle. Inspiré d’Euripide et de Corneille, le livret de François-Benoît Hoffmann se concentre sur l’héroïne plus que sur les événements extérieurs. De fait, le rôle-titre exige une soprano dramatique à la voix longue et endurante, capable de traduire le conflit intérieur du personnage, en particulier à l’acte II. Son évolution psychologique est également traduite par la richesse du discours harmonique, des timbres et de l’écriture orchestrale. Cherubini place la couleur au service du drame, notamment dans les scènes à grand spectacle (par exemple, l’orage puis l’embrasement du temple et du palais à l’acte III). Sa Médée n’a pas rencontré le public de la fin du XVIII^e siècle peut-être parce qu’en réalisant la jonction entre la tragédie lyrique et le grand opéra, elle était déjà intemporelle.